Les amoureux des promenades à marée basse les ont forcément déjà remarqués : ces fins filaments ressemblant à des cheveux au moyen desquels les moules s’arriment solidement aux rochers. Ceux-ci portent un nom : le byssus. Il s’agit en substance d’un ensemble de fibres très collantes qui leur servent à se fixer solidement aux structures solides de leur environnement.
Avancée majeure
Or, c’est en s’inspirant des propriétés adhérentes de ce byssus que des chercheurs Inserm de l’Institut Blood ans Brain de Caen, en Normandie, ont développé un agent de contraste (c’est à dire une molécule qui donne une opacité sur les images) permettant de percevoir par IRM de minuscules caillots sanguins quand ceux-ci était jusque là invisibles, même avec les machines d’imagerie les plus perfectionnées. Or, parvenir à repérer ces microthrombi qui entravent la circulation sanguine en plus de la zone de blocage principale constituerait de fait une avancée majeure dans la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux (AVC).
Et c’est là qu’intervient le produit de contraste révolutionnaire mis au point par Charlène Jacqmarcq et Thomas Bonnard. Les chercheurs français ont réussi le coup de génie de mimer avec ce produit certaines caractéristiques du byssus du bivalve. Ainsi, ils ont développé des particules magnétiques destinées à être injectées dans la circulation sanguine pour venir se coller aux microthrombi et révéler à l’IRM leur existence jusqu’ici imperceptible.
Des travaux importants
Les résultats de leurs importantes recherches ont été publiés le 13 juin 2024 dans Nature Communications. « Testé avec succès chez la souris, notre produit baptisé Physiomic [pour Polydopamine hybridised iron oxide mussel inspired clusters : grappes d’oxyde de fer hybridé à de la polydopamine inspirées des moules, NDLR], contient des particules d’oxyde de fer, recouvertes d’un composé très collant, présent à l’extrémité des fibres de byssus : la polydopamine », explique Thomas Bonnard dans le magazine de l’Inserm. Ces microparticules acquièrent donc la capacité de fixer une protéine sanguine impliquée dans la coagulation, le fibrinogène, de se lier aux caillots, même les plus petits, et de les rendre repérables à l’IRM grâces aux propriétés magnétiques du produit. Physiomic possède en outre une biocompatibilité et une faculté de biodégradation sécurisant son utilisation in vivo.
Repérer les microthrombi… mais aussi les traiter
L’équipe Inserm qui a développé ce produit va encore plus loin car elle travaille désormais à « combiner Physiomic à un médicament capable de dissoudre les caillots », ajoute Thomas Bonnard. Un produit de « théranostic » (contraction de thérapeutique et diagnostic) qui permettrait non seulement de repérer les microthrombi mais aussi de les traiter de façon ciblée.