En moyenne, neufs médicaments sont prescrits au cours de la grossesse en France, quand la plupart de nos voisins européens culminent à deux ou trois. A partir de ce constat, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a entamé une vaste campagne d’information à destination des professionnels de santé en mars 2021, puis du grand public en avril, sur les risques des médicaments pendant la grossesse.
Des demi-vies parfois longues
Parmi les messages que souhaite faire passer l’Agence figure le fait que l’automédication, pourtant pratiquée par 36 % des femmes enceintes, est à proscrire. Car des médicaments aussi courants que les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) comme l’ibuprofène « peuvent entraîner une fermeture prématurée du canal artériel et une hypertension artérielle pulmonaire, et ainsi la mort in utero même en toute fin de grossesse, et cela même après une seule prise », explique Céline Mounier, directrice de la surveillance à l’ANSM.
Et si on arrête un médicament avant d’être enceinte ? « Dans la plupart des cas, les médicaments vont être éliminés dans les heures ou les jours qui suivent l’arrêt, mais parfois les demi-vies sont plus longues ». Cela signifie que le temps nécessaire pour que la concentration de ce médicament dans le sang diminue de moitié peut obliger les femmes à patienter longtemps après l’arrêt d’un traitement avant d’envisager une grossesse.
Des molécules au risque important
L’isotrétinoïne, indiquée dans le traitement de l’acné, est ainsi contre-indiquée durant la grossesse, à cause de risques très élevés de malformations graves. Mais il est également nécessaire de poursuivre la contraception durant un mois après l’arrêt du traitement avant de concevoir un bébé. C’est également le cas avec le fingolimod, utilisé chez les patients atteints de sclérose en plaques : il est éliminé de l’organisme durant les 2 mois environ suivant l’arrêt du traitement. Un fœtus exposé à cette molécule risquerait de souffrir de cardiopathies sévères congénitales, d’anomalies rénales ou musculo-squelettiques.
Autre exemple, encore plus extrême : l’acitrétine, un rétinoïde utilisé contre les formes sévères du psoriasis, « possède un temps d’élimination tellement long qu’il nécessite une contraception 3 ans après l’arrêt du traitement, en raison de risques d’anomalies multiples : système nerveux, face, cardio-vasculaires, des glandes endocrines…», alerte Céline Mounier.
Grossesse et médicaments ne font vraiment pas bon ménage. N’hésitez pas à questionner votre pharmacien, le spécialiste du médicament, avant toute prise d’un traitement.