Première cause de mortalité prématurée en France, le cancer représente un défi de taille pour la médecine. Toutes formes confondues l’incidence des cancers est restée relativement stable chez l’homme, à + 0,1 % par an, et en hausse de 1,1 % par an chez la femme, selon une étude menée en 2019 par Santé Publique France. « Avec le vieillissement de la population, cette dynamique devrait se poursuivre, souligne Éric Solary, professeur d’hématologie à la faculté de médecine de l’Université Paris-Saclay. Cela contraste fortement avec la mortalité qui, dans le même temps, observe une baisse progressive » de 1,8 % par an chez l’homme et de 0,8 % chez la femme. « On se rapproche progressivement d’un taux global de rémission de 60 %, alors qu’il y a une vingtaine d’années, il n’était que d’environ 40 % », poursuit l’hématologue, qui est également membre du conseil scientifique de la fondation pour la recherche sur le cancer (ARC).
Différentes techniques au service du soin
Plusieurs facteurs peuvent expliquer l’amélioration de la situation. En premier lieu, la diversification des approches thérapeutiques. Si la chirurgie (ablation des lésions cancéreuses), la radiothérapie (irradiation localisée des tumeurs) et la chimiothérapie (injection ou prise par voie orale de médicaments) restent les soins de base dans de nombreux cancers, quelques exemples d’indications se traitant sans aucun de ces trois moyens commencent à voir le jour. C’est par exemple le cas de l’immunothérapie, une approche qui se développe particulièrement depuis une dizaine d’années. Son principe est de stimuler le système immunitaire et de le pousser à s’attaquer lui-même aux tumeurs pour les éliminer. « Les résultats obtenus avec les immunothérapies ont fait franchir un grand pas à de nombreux patients, et celles-ci sont désormais positionnées comme traitements de première ligne dans certains mélanomes et cancers du poumon », note le professeur Solary.
Au développement de l’immunothérapie s’ajoute aussi celui des virus oncolytiques (qui vont s’attaquer aux tumeurs de façon ciblée) ou l’emploi de technologies à base d’ARN messager, cette technique plus connue du grand public dans le cadre de la vaccination anti-Covid-19. Ces dernières, si elles ont encore des preuves à fournir, pourraient bien transformer la cancérologie dans les prochaines décennies. Bien sûr, les approches plus classiques n’ont pas non plus stagné. « Le nombre de molécules à disposition des oncologues est en constante augmentation, avec environ mille d’entre elles en développement en ce moment, ajoute Éric Solary. La radiothérapie et la chirurgie continuent également de s’améliorer, notamment grâce à la robotisation. »
La prévention avant tout
Cependant, la priorité des soignants est aussi la prévention. « Aujourd’hui, 40 % des cancers sont évitables ! », assène Manuel Rodrigues, président de la Société française du cancer et chercheur à l’Institut Curie. Consommation de tabac, d’alcool, alimentation, exercice physique et exposition au soleil sont autant de facteurs sur lesquels jouer pour améliorer ses chances de ne pas développer une tumeur. Les effets sont très concrets : l’incidence (+ 5,3 % par an) et la mortalité (+ 3,5 % par an) du cancer du poumon enregistrent la plus forte progression chez la femme, d’après Santé Publique France. « Une augmentation liée à la hausse du tabagisme chez les femmes dans les années 1970 et 1980 », se désole Éric Solary. Si, dans ce segment, le tournant de la prévention a bien été pris, « il faut aller plus loin dans celle liée à la consommation d’alcool, qui peine à s’organiser à cause de lobbies puissants », dénonce Manuel Rodrigues.
Autre grand levier de prévention du cancer : la vaccination. « Et en premier lieu celle contre les papillomavirus qui sont responsables de la majorité des cancers du col de l’utérus, mais aussi de certains cancers ORL », poursuit Éric Solary. Alors que ce vaccin a démontré son innocuité, « environ un quart de la population cible est aujourd’hui vacciné en France, contre près de 100 % en Angleterre ou en Australie où l’on constate déjà une baisse de la prévalence de ces cancers grâce à une politique de vaccination systématique dans les établissements scolaires, plaide Manuel Rodrigues. Il faut vraiment accélérer sur ce point car les effets mettent entre vingt et trente ans à se faire ressentir. » Le taux de vaccination contre l’hépatite B est aussi à surveiller, ce virus pouvant provoquer des cancers du foie.
Pour toute demande de conseil, votre pharmacien et votre médecin généraliste sont à votre disposition. Si vous avez entre 50 et 74 ans, ils peuvent également vous remettre un kit de dépistage du cancer colorectal, à réaliser à votre domicile tous les 2 ans. N’hésitez pas !