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Le vaccin anti-Covid a été mis au point trop rapidement

Article Info/Intox
Parmi les rumeurs qui circulent à propos des premiers vaccins autorisés contre le SARS-CoV-2, celle qui postule qu’ils ont été mis au point « trop rapidement » est couramment partagée. Qu’en est-il réellement ?

Un vaccin a pour objectif de présenter des éléments caractéristiques du virus à notre système immunitaire pour qu’il soit en quelque sorte préparé à son éventuelle entrée dans notre organisme, qu’il soit capable de le reconnaître et de l’attaquer pour le détruire aussi vite que possible. Les vaccins habituels (contre les maladies infantiles, contre la grippe…) sont composés soit d’un virus extrêmement affaibli ou inactivé (on ne garde que son « enveloppe » et pas le matériel contaminant qu’elle contient), soit de fragments du virus. Les deux premiers vaccins contre la Covid-19 disponibles en France s’appuient, eux, sur une technique bien différente appelée à ARN messager (ARNm). Dans leurs cas, on injecte aux patients cet ARNm qui va donner comme instruction à nos cellules de fabriquer la protéine S typique du SARS-CoV-2… Ainsi préparé à la reconnaître, notre système immunitaire sera capable de nous défendre efficacement en cas d’infection par ce virus.

Vite et bien

Alors que la crise sanitaire s’est accélérée dès le début de l’année 2020, les vaccins à ARNm ont été mis sur le marché moins de 12 mois plus tard. Un délai trop court ? Ce n’est pas l’avis de Bruno Pitard, pionnier des technologies de ces vaccins « de troisième génération » : « On peut travailler vite et bien. Ce n’est pas parce que l’on va vite que c’est bâclé. Et pas parce que l’on prend son temps que c’est bien », analyse celui qui est directeur de recherche au Centre de recherche en cancérologie et immunologie Nantes-Angers (CRCINA). Il explique qu’il est de toute façon impossible de griller une étape : « Tout cela est extrêmement encadré par les agences réglementaires européenne et américaine, l’EMA et la FDA. Elles seules vous autorisent à passer en phase 1, puis lorsque vous avez donné les résultats, en phase 2, puis en phase 3. »
Si la technologie des vaccins à ARNm est bien novatrice, est-elle pour autant expérimentale ? En fait pas du tout : ces vaccins à ARNm disposent du recul suffisant de la recherche et présentent de solides critères de sécurité. « Je travaille dans ce domaine depuis 25 ans. Nous avons commencé dans les années 1990 à utiliser des ARN, des ADN, en se disant qu’on pourrait faire exprimer l’antigène directement par l’individu à vacciner », rappelle ainsi Bruno Pitard.

Immunité focalisée

Cette technologie n’a d’ailleurs pas été choisie au hasard car elle est particulièrement efficace en matière de réponse immunitaire contre l’agresseur. « Alors qu’avec les vaccins à virus inactivé, par exemple, le système immunitaire est tenté de réagir contre toutes les protéines du coronavirus, avec ceux à ARNm, votre immunité est focalisée sur la réponse à mettre en œuvre contre le spicule de l’agent pathogène [la protéine S du virus, marqueur spécifique du SARS-Cov-2, ndlr] », explique Bruno Pitard. Pour simplifier, on pourrait dire que les vaccins à ARNm visent l’ennemi avec beaucoup plus de précision que leurs aînés. La recherche vaccinale contre la Covid-19 remonte en fait à 2003 car, « les travaux sur le SARS-CoV-1 ont facilité l’établissement du design de la protéine S du SARS-CoV-2. De surcroît, une phase de test vaccinal avait été effectuée chez l’homme, montrant que l’on disposait bien des anticorps contre la protéine S. Nous ne sommes donc pas partis de rien », conclut le spécialiste.       

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