Alors que la Covid-19 a mis à rude épreuve le suivi des personnes atteintes de cancer, les résultats de la 4e étude publiée par l’Institut national du cancer (Inca), Santé Publique France, le réseau français des registres des cancers (Francim) et le service de biostatistique des Hospices civils de Lyon renferme de bonnes nouvelles. Cette étude, qui apporte une vision dynamique de l’évolution de la survie à 1, 5 et 10 ans des personnes diagnostiquées entre 1990 et 2015 (730 000 personnes suivies au total), montre une amélioration de la survie à 5 ans pour une majorité de tumeurs solides (35 sur 41 localisations) et d’hémopathie malignes, les cancers du sang (10 sur 18). « Ces tendances de survie plutôt favorables sont le reflet des progrès réalisés dans le système de soins à la fois dans la détection des cancers, mais aussi dans leur prise en charge thérapeutique », analysent les auteurs.
De fortes disparités
Cette dynamique positive s’accompagne de fortes disparités, selon le type de cancer, le sexe du patient et son âge au moment du diagnostic. Ainsi, la survie à 5 ans oscille entre 96 % pour les cancers de la thyroïde (ceux au meilleur pronostic) et 7 % pour certaines tumeurs pulmonaires (les carcinomes à petites cellules ont le pronostic le plus défavorable). Malgré une amélioration globale, certains cancers demeurent en effet de mauvais pronostic comme ceux du pancréas, du foie, du poumon, du système nerveux central, de l’estomac : les patients touchés ont statistiquement moins de 33 % de taux de survie, soit 1 chance sur 3 d’être encore en vie 5 ans après l’annonce. A noter que ces cancers laissant peu d’espoir touchent davantage les hommes (32 % des cas de cancer chez l’homme) que les femmes (19 % chez la femme).
Comme le souligne l’étude, beaucoup de ces cancers de mauvais pronostic sont associés au tabac ou à l’alcool : c’est notamment le cas des cancers siégeant dans le foie, les poumons et l’œsophage. Cela signifie que la prévention pourrait permettre d’autres progrès : « Si les mesures de prévention vis-à-vis des consommations alcoolo-tabagiques étaient mises en place, 60 000 cancers pourraient être évités d’ici à 2040 », lit-on dans l’étude.
Des taux de survie importants pour certains cancers
Mais revenons aux bonnes nouvelles : les cancers de pronostic favorable (c’est-à-dire avec un taux de survie à 5 ans de plus de 65 %) représentent 40 % des tumeurs solides chez l’homme et 55 % chez la femme.
Parmi eux, celui affectant la thyroïde affiche le plus haut taux de survie (96 %). Bon pronostic aussi pour les mélanomes cutanés, les cancers de la prostate et des testicules (93%), les cancers du sein (88 %), ceux de l’utérus et les mélanomes de l’uvée (74 %), les cancers du rein (70 %) et du pénis (68 %).
Un bémol toutefois concernant le cancer du sein, qui reste tout de même la première cause de décès par cancer chez la femme : il est de bon pronostic à condition d’être détecté tôt, et les personnes jeunes ont une moins bonne survie que celles d’âge intermédiaire, en raison d’une fréquence accrue de tumeurs plus agressives.
Par ailleurs, l’immense majorité des hématopathies malignes ayant un pronostic favorable ont une survie à 5 ans supérieure à 80 %.
Le dépistage fonctionne
Autre catégorie, les cancers de pronostic intermédiaire, dont les statistiques fixent le taux de survie à 5 ans entre 33 et 65 %. Parmi eux figure l’un des cancers les plus fréquents, le cancer colorectal. Sa survie à 5 ans s’est améliorée de manière importante (+ 12 points depuis 1990) en grande partie grâce au dépistage.
Ces actions de dépistage sont également mises en avant pour expliquer le gain de survie pour le cancer de la prostate (+ 21 points) et pour le cancer du sein (+ 9 points).
Concernant le cas particulier du cancer du col de l’utérus, ce dépistage possède un effet paradoxal. Il est un fait que 9 cancers de l’utérus sur 10 peuvent désormais être évités grâce au dépistage des lésions précancéreuses. Mais la survie à 5 ans baisse légèrement pour ce cancer, de 64 % à 62 %, car la proportion de cancers diagnostiqués à des stades avancés ou agressifs, augmente au fil du temps. Cependant, une arme massive de prévention contre ce type de cancer existe : la vaccination contre les papillomavirus humains (HPV), responsables de l’apparition des lésions cancéreuses. L’Inca précise qu’actuellement moins de 20 % de la population cible est vaccinée : la marge de progression est donc encore grande.
Des améliorations de survie spectaculaires
Les gains les plus spectaculaires de survie entre 1990 et 2015 concernent deux hémopathies malignes : les leucémies myéloïdes chroniques (avec + 40 points entre 1990 et 2015), « lui conférant désormais un pronostic favorable », analyse l’étude, et les lymphomes diffus à grandes cellules B (avec + 25 points). Et ce, grâce « notamment au développement de l’accès et de l’utilisation de nouveaux traitements efficaces associés à un meilleur contrôle de leur toxicité ».