Les contaminants présents dans notre environnement peuvent se retrouver dans le lait maternel, et c’est ce que l’Anses a voulu évaluer dans cette expertise qui s’inscrit dans le Programme national nutrition santé (PNNS) et aussi le plan d’action engagé par les pouvoirs publics autour des 1 000 premiers jours de l’enfant, de la période in utero jusqu’à l’âge de 2 ans. L’Anses a donc estimé les niveaux d’exposition aux substances chimiques des enfants âgés de moins de 6 mois via le lait maternel et les aliments introduits lors de la diversification. Au total, 32 substances ou familles de substances ont été examinées, sur la base de scénarios simulant de nombreux cas de figure d’exposition différents.
Rassurant pour 20 substances, plus inquiétant pour 12 autres
Les résultats dont plutôt rassurants pour la majorité des substances étudiées, c’est-à-dire 20 d’entre elles pour lesquelles le niveau d’exposition n’est pas préoccupant pour la santé, ne dépassant pas les valeurs sanitaires de référence pour la voie alimentaire. Mais cela se corse pour 12 substances ou familles de substances pour lesquelles il est démontré que le niveau d’exposition des enfants allaités peut dépasser les valeurs sanitaires de référence. De quoi s’agit-il ? D’éléments-trace métalliques - arsenic inorganique, cadmium, chrome, manganèse, nickel et plomb - et de composés polychlorés (PCB, dioxines et lindane), polyfluoroalkylés (PFOS et PFOA) et polybromés (PBDE). Ces substances aux noms barbares, et qui ne mettent pas vraiment en appétit, sont présentes dans divers aliments, dans l’eau ou encore dans l’air.
Sur quelles données s’appuie l’Anses ?
Ces estimations des expositions aux contaminants s'appuient sur différentes études. Pour le lait maternel, sur Conta-Lait basée sur l’analyse de 180 échantillons de lait maternel recueillis dans diverses régions de France de 2013 à 2015. Et pour les contaminants présents dans les autres aliments du nourrisson, l’expertise intègre les données produites par l’étude de l’alimentation totale infantile (EATi). Publiée en 2016 par l’Anses, elle a permis d’évaluer l’exposition alimentaire des enfants non allaités de moins de 3 ans aux contaminants chimiques. Les analyses ont porté sur 670 substances recherchées dans les préparations infantiles et les aliments de la diversification.
Que faire ?
Ces résultats « soulignent le besoin d’agir collectivement sur 12 substances préoccupantes », affirme l’Anses. La majorité de celles identifiées comme problématiques sont connues pour polluer durablement l’environnement et s’accumuler dans les tissus gras et osseux du corps. Leur présence dans l’organisme des mères allaitantes provient de toutes leurs expositions passées. Quant à l’exposition des nourrissons aux contaminants métalliques, elle provient majoritairement des aliments couramment introduits pendant la diversification, note l’Anses. Elle juge qu’« il n’est pas pertinent de recommander aux femmes des actions individuelles pour limiter leur exposition et celle de leur enfant », vu que ces substances sont « très présentes dans l’environnement et les aliments, de façon générale » (toutefois, l’Anses a formulé en 2019 des recommandations de consommation de poissons pour les femmes enceintes et allaitantes).
Agir collectivement
L’Anses appelle en revanche à « renforcer l’action collective déjà engagée par les pouvoirs publics pour réduire la contamination de l’environnement et des aliments ». Comment ? « Par l’encadrement réglementaire des substances, l’identification et la maîtrise des sources de contamination et par la surveillance de la chaine alimentaire ». Enfin, cette expertise sur la contamination de l’alimentation des tout-petits n’entame en rien la confirmation très nette des effets bénéfiques de l’allaitement, révélés par la deuxième expertise de l’Anses.