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Les seniors doivent se vacciner davantage

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L’Académie de médecine regrette que les plus de 65 ans soient insuffisamment vaccinés et pointe l’urgence de rectifier le tir.

En France, la politique de vaccination priorise les nourrissons, avec onze vaccins à effectuer avant leurs dix-huit mois. Excellent réflexe que de protéger les tout-petits, mais cette habitude vertueuse ne doit pas faire oublier l’importance de l’immunisation des plus de 65 ans. Ces derniers représentent 20 % de la population française soit une personne sur cinq. Or, un récent rapport de l’Académie de médecine évoque « l’insuffisance des couvertures vaccinales [qui] crée un fardeau médical et économique de plus en plus lourd dans une population qui vieillit ». Les Sages sont critiques : « Bien que la vaccination soit un facteur reconnu de vieillissement en bonne santé, celle des personnes âgées ne figure pas parmi les objectifs prioritaires de santé publique. A l’exception des campagnes annuelles de vaccination contre la grippe, elle ne fait pas l’objet de campagnes d’éducation sanitaire, mais de simples recommandations inscrites au calendrier des vaccinations concernant les vaccins pneumocoque, Covid-19, zona et DTP ».  Or ces Recommandations sont « souvent ignorées du grand public et insuffisamment appliquées en médecine générale ». Les Sages y voient une « grave lacune de la médecine préventive » et proposent « des mesures pour mieux protéger les seniors contre des infections graves, voire mortelles, mais évitables ». Selon le rapport de l’Académie de médecine, « la vaccination des séniors devrait devenir un objectif prioritaire de santé publique. La protection vaccinale des personnes âgées doit être améliorée en impliquant tous les professionnels de santé. » Les pharmaciens font bien-sûr partie des soignants qui peuvent contribuer à cet objectif, puisqu’ils ont désormais l’autorisation de prescrire et injecter les vaccins qui figurent dans le calendrier vaccinal.

 

Cinq maladies cibles

S’il souhaitent encourager globalement la vaccination des Français les plus âgés, les experts réunis au sein de l’Académie de médecine ont établi plusieurs cibles stratégiques. Ils recommandent ainsi de « considérer comme prioritaires cinq maladies cibles dans les programmes de vaccination des séniors : outre la grippe et la Covid-19, il convient d’ajouter les infections dues au pneumocoque et au virus respiratoire syncitial (VRS), ainsi que le zona ».

Pourquoi l’Académie a-t-elle choisi précisément ces pathologies ? Parce qu’elles figurent parmi celles qui sont les plus graves pour les personnes âgées et les plus fréquentes.

« Les infections à pneumocoque sont en France la première cause de pneumopathie bactérienne et de méningite bactérienne chez l’adulte.» De plus,« l’incidence des infections invasives est majeure aux âges extrêmes de la vie, avant 2 ans et après 60 ans » et les trois quarts des sujets hospitalisés pour une pneumonie aiguë ont plus de 70 ans avec « une mortalité élevée autour de 20 % des personnes hospitalisées dans un état grave ».

L’infection à VRS, quant à elle, « peut être sévère chez les nourrissons de moins de 6 mois et chez les sujets âgés, surtout s’ils sont atteints de maladies chroniques (cardiaque, pulmonaire) ou d’immunodépression ». Les Sages ajoutent que le VRS cause chaque année en Europe « 250 000 hospitalisations chez les séniors et 17 000 décès ».

Quant au zona, son incidence augmente de façon importante avec l’âge, et « les complications surviennent surtout chez les patients très âgés et les immunodéprimés », qu’il faut protéger.

Concernant la grippe et la Covid, le message sur l’importance de la vaccination des seniors est mieux connu, même si dans les faits les immunisations ne sont pas encore suffisantes. Deux chiffres résument l’importance de protéger les seniors contre ces deux fléaux : pour la grippe, « sur une moyenne de 9000 décès annuels » qui lui sont attribuables, « plus de 90 % surviennent chez les 65 ans et plus » ; et pour la Covid, en France au début de la pandémie, « plus de 90 % des personnes décédées avaient plus de 60 ans, la tranche 80-89 ans étant la plus sévèrement touchée ».

Jamais trop tard pour se vacciner

L’une des recommandations marquantes du rapport est qu’il ne faut « jamais penser qu’il est trop tard pour vacciner une personne âgée ». En effet, explique l’Académie, « les effets de l’immunosénescence [c’est-à-dire de la perte d’efficacité du système immunitaire causée par l’âge] peuvent être surmontés par l’utilisation de nouveaux vaccins qui ont montré un gain d’efficacité chez les seniors ». Ces derniers sont particulièrement formulés pour les personnes âgées, et à ce titre ils ne seront pas utilisés chez les plus jeunes : Efuelda, le vaccin plus fortement dosé contre la grippe, Apexxnar, le vaccin contenant 20 valences contre le pneumocoque, Shingrix, le vaccin contre le zona, ou encore Arexvy, contre le VRS. C’est pourquoi la société savante recommande de « rendre disponible sans plus attendre les vaccins Arexvy et Abrysvo contre le VRS et le vaccin Shingrix contre le zona, autorisés en Europe mais n’ayant pas encore fait l’objet de recommandations en France. »  En effet, ce n’est pas parce qu’un médicament (les vaccins sont des médicaments) ont reçu l’autorisation d’être distribués dans un pays que les Autorités sanitaires en recommandent automatiquement l’utilisation. Les Sages appellent aussi à en « promouvoir l’utilisation en routine chez les seniors ».

Des freins qui doivent être dépassés

Plusieurs facteurs ont été repérés par l’Académie comme contribuant à l’insuffisance de la couverture vaccinale des séniors. Il est notamment question du  « manque de coordination entre les différents acteurs de santé », de « l’isolement » de certaines personnes « âgées, isolées et/ou dépendantes » qui ont « un accès réduit aux soins et aux vaccinations, en particulier dans les déserts médicaux ou zones sous-dotées », de « l’hésitation vaccinale » et enfin de « la crainte des effets indésirables » qui, « légitime à tout âge, doit être levée par le médecine après qu’il se doit assuré de l’absence des contre-indications ». L’immunisation régulière des personnes âgées s’inscrit dans un cercle vertueux : « elle augmente la durée de vie active et autonome, le bien-être général et la qualité de vie », et permet « d’éviter le déclin fonctionnel post-infectieux qui représente la sixième cause d’invalidité chez les personnes âgées ». Le rapport appelle pour conclure à ce que « la vaccination soit être reconnue comme un des principaux déterminants du vieillissement en bonne santé », un principe de plus en plus important à l’heure où la proportion de seniors dans la population augmente.

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