« Ayant ouvert une consultation dédiée à la prise en charge des coliques du nourrisson depuis quelques années, je rencontre des parents désemparés et angoissés devant les pleurs inconsolables de leur bébé. Il me tenait à cœur de développer un outil d’évaluation de l’état du bébé mais aussi de l’impact de ses pleurs sur la qualité de vie des parents », explique le Dr Marc Bellaïche. Ce gastro-pédiatre de l’Hôpital Robert-Debré (Paris) s’est associé à une équipe d’experts pédiatres, généralistes et psychologues, aux laboratoires Laudavie, à une entreprise spécialisée dans la statistique et le développement des échelles (MAPI) et à l’Institut des Mamans pour créer ColiQ.
Comment fonctionne Coliq ?
Après avoir créé gratuitement leur compte, les parents répondent à un questionnaire pour évaluer l’importance des pleurs, l’inconfort digestif du nourrisson et l’impact de ces manifestations sur la famille. ColiQ donne aux utilisateurs un score qui pourra servir de base de dialogue avec le pédiatre ou le généraliste. L’idée est de permettre une évaluation aussi objective que possible de ces troubles digestifs : le médecin pourra alors adapter le traitement et ses conseils au mieux. En parler avec les parents en s’appuyant sur leurs réponses au questionnaire atténuera l’angoisse de ces derniers.
Une échelle d’évaluation standardisée des coliques du nourrisson
Les coliques du nourrisson sont « une vraie entité décrite dans les critères de ROME 4, [une classification] qui définit les troubles fonctionnels intestinaux », explique le Dr Bellaïche dans une vidéo explicative proposée sur le site ColiQ. Selon lui, « un bébé sur deux a une mise en train un petit peu houleuse dans les trois premiers mois de vie ». Et « en fonction de l’environnement de la maman, il va y avoir des troubles qui vont être plus ou moins importants et plus ou moins délétères, et chez le bébé, et chez la maman, et dans la famille ». Les solutions pour soulager le nourrisson sont axées sur la réassurance avec l’emmaillotage, les massages, le portage… Côté traitement, les médicaments de la classe des inhibiteurs de la pompe à proton (IPP), qui agissent en limitant l’acidité gastrique, ne sont pas recommandés en cas de coliques, explique le médecin dans une publication sur le sujet parue dans Réalités pédiatriques en 2019. En revanche, « huit méta-analyses convergent vers l’efficacité du L. reuteri DSM 17938 protectis » (un probiotique), avec un effet « majoré chez les nourrissons allaités exclusivement au sein ». D’autres produits à base fenouil, de fleur de tilleul et de fleur d’oranger, sont également pertinents.
Trois ans de travail pour mettre en place cet outil
La mise en place de ColiQ représente trois ans de travail durant lesquels les experts ont interviewé 3 000 mamans de bébés de moins de 3 mois. Pour établir cette échelle standardisée, objectivée, ils ont dû s’adapter au langage des mères. « Même si on apprend à parler le maman [sic] quand on est pédiatre, je suis d’une génération qui n’est pas celle des mamans. Or c’était important de savoir comment elles ressentent les choses », explique le Dr Bellaïche. Son analyse ? « C’est une génération de mamans qui veut de plus en plus d’objectivité. Dans le même temps, il s’agit de symptômes et d’une pathologie qui sont à l’évidence énormément empreints de subjectivité ». D’où l’importance de cet outil avec des critères d’évaluation objectifs.
Comment se déroule l’évaluation ?
Les échelles de ColiQ s’appuient sur un questionnaire en deux volets, l’un concernant le bébé et l’autre son environnement, la maman et l’impact que ces difficultés ont sur la famille. Il faut entre 8 et 20 minutes pour remplir ce questionnaire, seul à la maison ou au cabinet médical avec le pédiatre.
Quelles sont les questions ?
Le questionnaire sur le bébé vise à évaluer la durée des pleurs, à savoir si le bébé serre les poings, devient rouge, se tortille… sans que cela signifie forcément qu’il souffre. « Il n’y a aucune preuve que ces pleurs soient causés par une douleur (abdominale ou autre) », précise le Dr Bellaïche. ll fait d’ailleurs remarquer que « les coliques sont insensibles à tous les antalgiques [et qu’] il faut donc insister auprès des parents pour qu’ils cessent de ressentir ces coliques comme une douleur non traitée efficacement ». Le questionnaire sur l’impact familial pose des questions du type « Vous sentez-vous stressés, débordés ? Y a-t-il davantage de disputes ? ». L’utilisateur obtient un score sur 100. Plus sa valeur se rapproche des 100, plus la situation est « normale » ; plus elle s’en éloigne, moins le bébé semble bien. Il est intéressant de remplir ce questionnaire régulièrement, notamment après avoir commencé à appliquer les conseils voire les prescriptions du médecin. Cela rendra visibles les progrès et rassurera les parents.
Un outil de prévention
Ces coliques sont passagères et fréquentes, mais il ne faut pas ignorer leur côté angoissant. Car l’inquiétude et le stress peuvent conduire les parents à se conduire de façon inadaptée voire dangereuse avec l’enfant. Cet outil numérique accessible facilement permet une sorte de guidance parentale, « essentielle pour prévenir les rares mais graves syndromes du bébé secoué induits par les pleurs incessants », écrit le Dr Bellaïche dans Réalités pédiatriques. Comme la nouvelle application « Bulle 1000 jours », ColiQ guide les parents connectés dans la grande aventure de la parentalité.
